
![]() Il arrive parfois que le spectateur s'étonne de retrouver la même intrigue - ou presque - servir les scénarios de deux films qui sortent quasiment simultanément. C'est souvent étonnant, parfois logique ... Un phénomène qui prend de l'ampleur avec la mondialisation et l'augmentation du nombre de films produits. En 2019, il y aura deux films pour évoquer l'assassinat de Sharon Tate, l'actrice et épouse de Roman Polanski : Il était une fois Hollywood de Quentin Tarantino et The hauting of Sharon Tate de Daniel Farrands. Pas un film de cinéma sur ce drame en un demi-siècle et voici deux films la même année produits aux Etats-Unis. Les traitements seront très différents mais la coïncidence est troublante. Avec plus de 500.000 films produits depuis 120 ans, les scénaristes et réalisateurs ont montré leur capacité à créer des oeuvres originales. C'est loin d'être évident avec un object fictionnel qui doit suivre des schémas récurrents pour satisfaire les attentes des spectateurs et créer de la dramatique. Ainsi la structure en trois actes est devenue la norme entre une présentation des personnages et du nœud de l'intrigue, puis un acte 2 centré sur la déclinaison de cette intrigue pour aller vers la résolution avec habituellement au moins un coup de théâtre qui relance la dynamique et enfin une dernière partie qui se concentre sur la résolution du problème du héros autour d'un climax. Cela permet à quelques théoriciens de proposer des recettes pour écrire un "bon" scénario, de John Truby à Robert McKee. George Martin a même identifié les 20 intrigues types que l'on retrouve habituellement dans les structures narratives des films :
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Sergio Leone et Ennio Morricone ont insufflé un second souffle au western en 1964, mais le succès du film Pour une poignée de dollars a généré plus de 400 films en 10 ans qui auront fini par décrébiliser le genre auprès du grand public. Un film qui commence par les retrouvailles involontaires de deux auteurs encore inspirés par le recyclage avant de trouver là les bases de leur art.
Quand on associe Ennio Morricone à un réalisateur italien, un nom revient logiquement : Sergio Leone. Pourtant, ils n'auront fait que six films ensemble sur des réalisations du maître du western italien [1] alors que le compositeur romain aura contribué à 12 films de Giuliano Montaldo et même 15 de Mauro Bolognini. Mais Sergio Leone aura été à l'origine de la renommée d'Ennio Morricone quand Ennio Morricone aura contribué à révéler Sergio Leone dans l'histoire du cinéma. La rencontre cinématographique a eu lieu en 1964 avec Pour une poignée de dollars, le premier film de la trilogie de l'homme sans nom avec Clint Eastwood.
Avant 1964, Ennio Morrincone n'avait que trois ans dans l'industrie cinématographique avec un dizaine de films italiens aujourd'hui oubliés, dont quatre de Luciano Salce qui fut le premier à faire appel à lui. Après, il s'imposera comme l'un des principaux compositeurs du siècle (malgré trois Razzies du pire compositeur de musique de film pour un seul Oscar). Il joue déjà avec des orchestrations travaillées et à intégrer des bruitages ou instruments originaux à ses compositions. Sergio Leone s'est lui fait une réputation dans le milieu comme assistant-réalisateur (dont la course de chars de Ben-Hur), mais il reste inconnu du public malgré le succès du Colosse de Rhodes archétype du péplum avec tous les défauts du film de genre de l'époque. Les deux auteurs sont tellement peu connus qu'ils vont signer leur première rencontre sur l'écran sous pseudonyme. Au générique, Sergio Leone devient Bob Robertson et Ennio Morricone se nomme Dan Savio [2]. Une pratique habituelle des producteurs italiens pour cacher l'origine transalpine du film.
![]() Quand les exploitants regrettent que certains films ne sortent plus en salles, ils en appellent à l'essence même du cinéma. Le cinéma est né avec un public devant des images, mais entre le contenu (le film) et le contenant (la salle), il y a deux définitions du cinéma qui s'affrontent ... de façon intéressée. L'histoire du cinéma se répète une fois de plus. Les festivals de cinéma sont l'un des plus bels écrins pour le cinéma. Ils permettent de transformer en événement la sortie d'un film lors d'avant-premières médiatisés avec des stars qui se prêtent volontiers tant à la promotion du film en question (surtout si elles jouent dedans) qu'à la leur. Même si l'art est désintéressé, il s'agit d'un "désintérêt intéressé" où tout est produit [1]. Et tout le monde se tient pour maintenir un équilibre financier où chacun a l'habitude de prendre une part des flux financiers qui transitent, tant pour faire le film (les artistes et techniciens) que pour recevoir une part des recettes (exploitants, distributeurs, producteurs et ... artistes). Il n'en est pas vraiment autrement dans les autres secteurs. Mais ce secteur revendique sa spécificité culturelle ; il relève essentiellement de puissants oligopoles (quelques grands diffuseurs, têtes d'affiche et festivals en particulier) et d'une faible concentration (des milliers de producteurs et des milliards de spectateurs). C'est à la fois une industrie et un artisanat. Le choc est donc violent lorsqu'un nouvel acteur, comme Netflix, vient troubler des équilibres construits depuis longtemps et qui avaient su satisfaire tout le monde après l'avènement de la télévision payante et de la vidéo dans les années 80. Plus de trente ans déjà.
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On aimerait bien parfois que la réalité soit plus belle que la fiction ou se battre pour gagner contre les moulins à vent. Terry Gilliam reste un rêveur qui maintient ce fantasme depuis quarante ans dans ses films. Il aura passer la moitié de cette période à nous proposer sa version de Don Quichotte. L'histoire est belle. Presque trop belle.
Qu'on aurait voulu que l'histoire se termine avec une happy end de cinéma ! On en venait à rêver qu'on en ferait un jour un film à Hollywood. Il y a bien un film sur le tournage de Citizen Kane (RKO 281) et sur celui de Psychose (Hitchcock). Même les nanars Plan 9 form Outer Space et The Room ont eu le droit à un hommage distancé dans de jolies films avec respectivement Ed Wood de Tim Burton et The disaster Artist de James Franco.
Alors quand on revient sur la tumultueuse histoire de L'homme qui tua Don Quichotte, on se dit que la persévérance de Terry Gilliam à tourner son film et à le montrer à Cannes suffit à finir le film de son film. Il faudra alors cacher l'essentiel : l'avis du public et le dernier rebondissement judiciaire.
Rappelons que Don Quichotte de Cervantes prête à des interprétations diverses. Le roman décrit un personnage avec une vision du monde singulière qui part en croisade dans l'Espagne du 16ème siècle : on peut y voir la fatalité des désirs inassouvis ou la volonté de voir le monde tel qu'on le rêve plutôt que comme il est (ou l'inverse ?). En tout cas, ses thèmes se prêtent particulièrement à un artiste comme Terry Gilliam qui a toujours transformer la réalité tel qu'il voulait la fantasmer. C'est au centre de son prologue du Sens de La Vie (The Crimson permanent Assurance), de Brazil ou encore des Aventures du Baron de Munchausen. On ne s'étonne donc pas que le réalisateur américain (le "Yankee" des Monty Python) ait eu le coup de foudre pour adapter librement cette histoire de ce "généreux et idéaliste redresseur de torts".
Steven Spielberg a confirmé récemment qu'Harrison Ford allait reprendre son rôle d'Indiana Jones pour un cinquième épisode (avec toujours John Williams à la musique). A 78 ans au moment de la sortie prévue, c'est un choix courageux pour certains, anachronique pour d'autres. Quelles étaient les autres options pour le studio ? Alors que 80% du top10 au box-office américain de l'année 2015 était des suites ou remakes, la question du renouvellement des franchises se pose avec le vieillissement des héros. Le cinéma de franchise existe depuis le cinéma muet qui a très vite compris l'aspect fidélisant de s'appuyer sur des héros récurrents (Bébé, Fantomas...). La caractérisation des personnages non parlants permettait de retrouver le même héros - interprété au moins par le même acteur - sans qu'on sache vraiment si c'était le même personnage (Buster Keaton, Charlie Chaplin...). Rappelons que le nom de Charlot dans les titres des films de Chaplin est une réalité française qu'on ne retrouve pas dans les titre originaux [1].
Pour autant, pour des raisons économiques évidentes, il est bien difficile d'abandonner une franchise à cause d'un personnage vieillissant d'autant que le monde fictionnel s'autonomise facilement du monde réel. Le public est fidèle non pas seulement à un concept qui a fait ses preuves, mais aussi à la connivence qui s'est créée avec un personnage récurrent comme un ami que l'on connait depuis longtemps et à qui on pardonne volontiers ses faiblesses. C'est un phénomène similaire qui permet de créer une addiction à des héros de série même lorsque la qualité chute progressivement. Reprendre un acteurs iconique d'une saga pose à un moment quelques problèmes : compte tenu de l'existence d'un désir mimétique, les héros jeunes attirent plus et les phénomènes d'identification ne sont pas favorables à conserver un acteur âgé pour toucher un public plus jeune, au risque de réduire l'audience et donc le succès. C'est pour être franchement orienté vers le renouvellement de son public que le producteur Steven Spielberg renonça dès l'origine à inclure l'un des acteurs-vedettes des premiers films pour Jurassic world. Par ailleurs, lorsque le succès est là il y a naturellement inflation. C'est pour une raison de gros sous que Robert Duvall n'est pas dans Le parrain 3 (il avait demandé le même salaire qu'Al Pacino) ![]()
L'image de synthèse est devenue depuis 30 ans maintenant une composante à la disposition des réalisateurs. Elle permet aux créateurs de proposer les images qu'ils ont en tête avec la possibilité d'ajuster en post-production. Ca change la façon même de concevoir tournages et décors.
Quelques vidéos pour visualiser des images de synthèse d'aujourd'hui dans des usages variés.
L'usage des images de synthèse date des années 70 où on les utilisait pour simuler une image numérique dans les films de science fiction. C'est ainsi que dans Mondwest (1973), les images subjectives de ce que voit le robot sont ainsi pixélisées. Dans sa suite, Les rescapés du futur, l'image de synthèse passe de la 2D à la 3D avec le visage scanné de Peter Fonda apparaissant sur un écran. Et bien sûr, dans Star Wars Un nouvel espoir (1977), c'est grâce à une image de synthèse également que Luke peut suivre son tir dans le circuit d'aération de l'étoile de la mort.
Mais c'est dans Tron (1982) que l'on a une partie entière du film - un quart d'heure - qui y a recours. Là encore, ce n'est pas pour simuler la réalité, mais pour projeter le héros dans un jeu vidéo.
Deux ans plus tard, on a enfin la première image de synthèse qui cherche à représenter une image photo-réaliste avecThe last starfighter (1984) et ses vaisseaux spatiaux, puis 2010 et sa planète Jupiter. Et en 1986, ILM va être l'auteur de la première image photo-réaliste d'un personnage animé dans Le secret de la pyramide où un vitrail prend vie pour attaquer un jeune Sherlock Holmes. C'est toujours ILM qui réussit peu après le premier Morphing dans Willow (1988).
![]() Jean-Jacques Annaud a fait bouger le cinéma français des années 80 en lui donnant une ambition à laquelle il était mal habitué (La guerre du feu, Le nom de la rose et L'ours). Il se lançait en 1994 dans la production des Ailes du courage, un moyen-métrage en 3D Imax en avance sur son temps. D'où l'intérêt rétrospectif de se pencher sur sa vision à l'époque du cinéma d'aujourd'hui. Une vision où l'Imax serait dominant.
![]() La semaine est marquée par quelques suites atypiques qui arrivent sur les écrans ou dont le projet vient d'être annoncé. Fruits d'une tendance nostalgique ou solutions de producteurs pour réduire son risque, ses films marquent une démarche de recyclage parfois étonnante Cette semaine, on a appris en France le projet de donner une suite aux Aventures de Rabbi Jacob, la comédie devenue culte avec Louis de Funès. Il s'agira d'y raconter les aventures de Rabbi Jacqueline avec notamment Danièle Thomson à l'écriture comme pour le premier film réalisé par son père. Aux Etats-Unis, c'est un scénario de la jeune actrice Jen d'Angelo qui fait parler de lui alors qu'il n'est pas encore acheté par le moindre studio. Il s'agit d'un potentiel spin-of de Titanic focalisé sur des personnages secondaires du film de James Cameron qui s'est retrouvé sur la fameuse Black list des scénarios les plus en vue à Hollywood [1]. A Rosencrantz and Guildenstern Are Dead take on Titanic. An overprotective mother attempts to keep her teenage daughter, young son, and rowdy sister together while sailing on the doomed voyage of the Titanic in 1912. Ce qui étonne dans les deux cas, c'est que les deux films n'appelaient pas naturellement une suite. Le décès des acteurs de l'original et l'histoire concept du second rendaient l'idée de suite bien peu spontanée. C'est faire peu de cas de l'imagination de l'esprit créatif des artistes. La fausse bande-annonce suivante de Titanic 2 rassure quant à la possibilité d'en rajouter toujours un peu plus après la fin d'un film [2].
![]() A Hollywood, la polémique sur les salaires des acteurs rebondit sur fond de guerre des sexes depuis le coup de gueule de Jennifer Lawrence. Néanmoins l'équilibre homme-femme en matière de rémunération ne serait pas justifié à Hollywood : les actrices devraient gagner plus ! Jennifer Lawrence avait découvert l'inégalité de traitement en décembre 2014 lorsque les mails de Sony rendus public montrèrent que pour American Hustle, Amy Adams et elle avaient obtenu moins que chacun des trois acteurs masculins. Récemment, elle revenait sur cette révélation dans Letters to Jenny :I found out how much less I was being paid than the lucky people with dicks Elle s'en voulait de sa mauvaise capacité à négocier, mais aussi de l'attitude des Studios vis-à-vis d'une femme qui négocie son salaire.
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Docteur en Sciences de l'information et de la communication, Laurent Darmon est devenu par cinéphilie un spécialiste de la réception cinématographique et de la sociologie du cinéma.
Il est l'auteur d'une thèse sur "l'itinéraire de l'évaluation d'un film par le spectateur au cinéma", anime des conférences et a été le Président de la Commission Cinécole 2016. Parallèlement, il est en charge du digital dans une grande banque française.
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