Les plus jeunes découvrent les films dans un environnement distinct de celui de leurs aînés : expériences cinéphiliques différentes, proposition de films enrichie, habitudes générationnelles etc. A chaque génération, il faut réimaginer ce qu'un film signifie pour ses nouveaux spectateurs. La Saga de George Lucas est à ce titre un cas d'école. Star Wars a imposé sa mythologie à travers la richesse de son univers, la cohérence des histoires et la symbolique de ses personnages. Cette richesse offre finalement de multiples portes d'entrée entre préquel, séquel, spin-off et univers étendu. Il y a des grandes questions qui obsèdent les fans de cinéma et pour lesquelles il serait vain de chercher à apporter des réponses. La toupie d'Inception s'arrête-t-elle de tourner ? Deckard est-il un réplicant dans Blade Runner ? Que dit Bill Murray à l'oreille de Scarlett Johansson à la fin de Lost in translation ? En fait, ces questions perdurent dans la mythologie cinéphilique parce qu'il n'y a pas de réponse évidente. Même lorsque Ridley Scott apporte une réponse pour Blade Runner ("c'est un replicant"), les spectateurs ne sont pas convaincus (et Harrison Ford non plus). Dans quel ordre voir les films Star Wars fait partie de ces questions qu'il serait vain de trancher tant les arguments peuvent s'opposer. Et là encore, l'avis de George Lucas qui privilégie l'ordre chronologique n'a pas plus de valeur que celui d'autres spectateurs puisqu'en offrant ses films dans l'espace public, son créateur laisse chaque spectateur en faire ce qu'il veut. Le public a autant de droit à poser sa propre appréciation que de définir la carrière de spectateur idéal pour voir les films de la série La Guerre des Etoiles. C'est pourquoi la façon la plus naturelle d'un spectateur de répondre à cette question sur l'ordre de visionnage idéal revient souvent à se reporter à sa propre expérience. Ceux qui ont connu la sortie des films depuis la première trilogie (77/80/83) avant la prélogie (99/02/05) défendent souvent l'ordre de réalisation [1]. A l'inverse, les plus jeunes qui ont grandi avec le personnage d'Anakin Skywalker voit plus de logique à suivre le personnage grandir et évoluer de film en film.
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Docteur en Sciences de l'information et de la communication, Laurent Darmon est devenu par cinéphilie un spécialiste de la réception cinématographique et de la sociologie du cinéma.
Il est l'auteur d'une thèse sur "l'itinéraire de l'évaluation d'un film par le spectateur au cinéma", anime des conférences et a été le Président de la Commission Cinécole 2016. Parallèlement, il est en charge du digital dans une grande banque française.
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