- Black Panther (Disney) 16 février 2018
- New Mutants (Fox) 13 avril 2018
- Avengers : Infinity War (Disney) 4 mai 2018
- Deadpool 2 (Fox) 1er juin 2018
- Les indestructibles 2 (Disney) 15 juin 2018
- Ant-Man and the Wasp (Disney) 6 juillet 2018
- Venom (Sony) 5 octobre 2018
- X-men : Dark Phoenix (Fox) 2 novembre 2018
- Animated Spider-Man (Sony) 14 décembre 2018
- Aquaman (Warner) 21 décembre 2018
Le public est abreuvé de films de super-héros depuis le début du siècle. Le cinéma accélère la production et les séries se multiplient. Si on se réfère à l'histoire du cinéma, il est pourtant fort possible que cela touche prochainement à sa fin. On y est pas encore. Loin de là. Le succès des super-héros depuis leur création par Marvel dans les années 40 tient tant à cette envie de s'identifier aux héros surpuissants qui donnent une revanche sur la vie réelle que de celle de pouvoir se savoir sauver par eux en cas de difficulté. Il n'est donc pas étonnant qu'ils soient si populaires chez les plus jeunes qui souffrent d'un complexe face aux adultes ou des adolescents qui cherchent à imposer leur identité sociale. Le regain d'intérêt auprès des adultes est plus récent et doit beaucoup au cinéma qui a pu redonner une seconde jeunesse au sous-genre grâce à une approche narrative mieux construite et au progrès des effets-spéciaux. Iron-Man fête d'ailleurs ses 10 ans cette année. Le public est animé de deux dynamiques pour aller au cinéma. La première le conduit à aller voir ce qui lui plait. La seconde à éviter ce qui risque de le décevoir. Ce sont ces deux phénomènes qui expliquent aujourd'hui le succès des films inspirés de héros Marvel (Avengers, X-men, Spider-man...) et DC Comics (Batman, Superman, Wonder woman...). Parce qu'il veut voir ce qui lui plait, le spectateur a tendance à retourner voir les films qu'il connait et lui apporte son lot de sensations. Les films super-héros apportent l'action qui stimulent et la réassurance d'un univers qu'il connait bien et apprécie. Sur ce point, les films de franchise s'appuient sur ce qui a fait le succès des séries télévisées, la connivence qui se crée avec le temps entre le public et les personnages récurrents. Avec des univers uniques et cohérents, Marvel/Disney et DC Comics/Warner tiennent une formule qui marche. Le genre même autorise de sortir le spectateur de la routine avec des images jamais vues (et pourtant toujours un peu les mêmes en CGI), chaque super-héros développant des pouvoirs étonnants avec un prisme spécifique. Spider-man nous parle de la difficulté d'être adulte, X-men de la tolérance, Batman de la rédemption, Docteur Strange de la nécessité de se libérer du matérialisme etc. mais à la fin, c'est toujours un gentil qui se bat violemment contre un très méchant pour gagner finalement en apprenant sur lui-même. Au début des années 2000, il y avait un film par an entre les franchises X-men et Spider-man. Puis le succès d'Iron-man (première production 100% Marvel) et de Batman (version Christopher Nolan) ont conduit Hollywood à accélérer les choses. Et comme les droits des X-men (et ses dérivés comme Deadpool) et des 4 fantastiques appartiennent à Fox et ceux de Spider-man à Sony, nous avons, avec Disney et Warner, quatre gros studios motivés désormais à sortir leur blockbuster régulièrement. c'est même une obligation pour Fox et Sony pour pouvoir conserver les droits). Conscient de désormais sous-exploiter sa franchise Spider-man, Sony s'est allié à Disney/Marvel pour sortir son Spiderman : Homecoming l'an dernier. Pour 2018, ce n'est pas moins de 10 films qui sont annoncés sur les agendas de sortie : Ce n'est pas prêt de s'arrêter a priori, puisqu'on en annonce déjà neuf autres pour 2019 et la liste est appelée à s'enrichir (Gambit...) Et encore, cela n'est rien quand on rajoute la dose de super-héros que le cinéphile peut compléter grâce à la télévision. On compte douze séries pour le seul univers Marvel. Les Avengers ont généré Les agents du Shield et Agent Carter. On vient de voir arriver le groupe des Inhumains, et celui des Defenders, lui-même précédé par des séries autonomes pour chacun de ses membres : Jessica Jones, Luke Cage, Iron Fist et Daredevil. Annoncé dans la série Daredevil, The Punisher a maintenant sa propre série. On annonce aussi Runaways et New warriors en 2018. L'univers d'Alan Moore (V pour Vendetta, la ligue des gentlemen extraordinaire...) pourrait se voir décliner à la télévision : après un film très réussi Watchmen, une adaptation en série est à l'étude pour HBO. Les producteurs n'ont aucune raison de s'arrêter tant que ça marche. Et ça marche actuellement. Alors que l'été n'est pas fabuleux en salles pour les blockbusters en général, les super-héros se portent bien avec trois représentants dans le top 6 des recettes 2017 aux USA viennent d'un film à super-héros : Wonder woman, Les gardiens de la galaxie 2 et Spider-man homecoming. Et l'automne a suivi la tendance avec le troisième film dédié à Thor qui a largement battu le score des deux premiers épisodes. Au niveau des séries, le succès est là aussi. Netflix vient de commander les nouvelles saisons 2 des quatre héros des Defenders en série autonome. Legion (inspiré de l'univers X-men) a une très belle cote d'amour, et son renouvellement est uniquement dépendant de l'emploi du temps de son showrunner (occupé sur Fargo). Et ces séries sont au centre de la guerre des contenus que vont se livrer les plateformes vidéos : Disney a annoncé qu'il gardera désormais les prochaines séries Marvel pour sa future plateforme encore à lancer. Mais on voit déjà poindre une volonté de parler du genre autrement. Pour se rénover car il faut éviter l'inévitable lassitude. Deadpool avait adopté une violence rare pour ce type de film, les gardiens de la Galaxie adopte un ton ironique et The tick penche clairement vers la comédie. Même un héros déjà lancé comme Thor s'est renouvelé à son troisième film avec une version plus "pop". Et même si on peut faire mourir Wolverine dans Logan, on promet déjà un spin-of avec X-23 prochainement. Décidément, les super-héros sont indestructibles. Pourtant, l'histoire du cinéma a montré que les goûts des spectateurs marquent des cycles. A un moment, un genre cesse de se renouveler suffisamment et le public se lasse de retrouver les mêmes schémas sans l'originalité. C'est ainsi que le Western a disparu dans les années 60, trop repris par la télévision. Le Studio Marvel travaille pour le moment avec une grande attention ce point et s'attache de film en film à apporter à la fois de la continuité et à adopter des points de vue sans cesse renouvelés. Les films de super-héros devront donc désormais non pas leur succès aux artistes des effets-spéciaux devenus standardisés, mais aux talents des scénaristes. Les super-héros sont donc à la merci d'une grève des auteurs.
|
Docteur en Sciences de l'information et de la communication, Laurent Darmon est devenu par cinéphilie un spécialiste de la réception cinématographique et de la sociologie du cinéma.
Il est l'auteur d'une thèse sur "l'itinéraire de l'évaluation d'un film par le spectateur au cinéma", anime des conférences et a été le Président de la Commission Cinécole 2016. Parallèlement, il est en charge du digital et de l'innovation dans une grande banque française.
|