Le 19 janvier serait la Journée du popcorn. Mais ce céréale cuisiné n'a pas vraiment bonne réputation. Avec ses plus de 1200 calories pour un grand sac, il n'est pas dans la tendance du manger sain. Avec le bruit de craquement dans la bouche et son odeur forte, il gêne le cinéphile. Avec la fâcheuse tendance à en mettre partout, il est l'horreur du personnel des salles.
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La crise qui suit le Krach financier d'octobre 1929 va changer la donne. Les cinémas qui ont connu un regain d'intérêt avec le parlant voient la fréquentation d'abord baisser. Les premières grandes salles ferment. Mais en s'adaptant, le cinéma retrouve rapidement son public qui cherche à oublier ses difficultés économiques, mais cela se fait au détriment des marges, le ticket d'entrée augmentant moins vite que l'inflation (ce sera l'inverse après 1948). Les exploitants vont devoir s'adapter et le popcorn arrive pour les sauver. Plutôt que de voir le consommateur payer son popcorn hors du cinéma, les exploitants américains - les français attendront - décident d'exploiter à leur tour cette confiserie à bas coût et à marge très élevée. Les ventilations de ces salles ne sont pourtant pas trop bien adaptées pour le popcorn qui dégage sa forte odeur. Les cinémas qui refusent cette évolution connaissent souvent des difficultés alors que ceux qui évoluent voient leur profit augmenter [1].
Pour le spectateur, c'est aussi gagnant car pour quelques cents (de 5 à 10), il peut se remplir l'estomac en plus de se remplir l'esprit. Le popcorn sauve effectivement le cinéma et le lien entre les deux restera très fort. De fait, lorsque la fréquentation des salles chute dans les années 50 et 60 avec l'arrivée de la télévision dans les foyers américains, L'industrie du Popcorn régresse également.
Ce sera temporaire car un effort de promotion à travers des publicités qui font désormais partie de la culture américaine vont maintenir le popcorn comme la star des snacks.
Aujourd'hui, aux Etats-Unis, les confiseries dans les cinémas représentent environ 20% des recettes, mais plus de 40% des profits [2]. La raison de ce déséquilibre vient du fait que l'exploitant de la salle garde la totalité de la marge sur les confiseries alors qu'il la partage avec le distributeur sur le prix de la place de cinéma. Et au sein des confiseries, le popcorn est le produit le plus margé. L'économiste Richard B. McKenzie estime que le prix de revient d'une once de popcorn est de 12,5 cents pour un prix de vente de 1,375$ pour le sac "regular" [2]. En France, le phénomène est moins fort [3], mais a considérablement augmenté depuis 20 ans avec le succès des multiplexes.
Ainsi lorsqu'on regarde les scores au box-office, le bilan économique néglige cet aspect financier très important pour l'exploitation des salles de cinéma : la recette unitaire n'est pas du tout la même pour un film selon sa propension à voir son public acheter un sachet de popcorn.
Movie Theaters Haven't Innovated Beyond Popcorn (Reed Hastings - CEO Netflix)
Une sorte de Tautologie en fait.
[1] - Popped Culture: A Social History of Popcorn in America - Andrew F. Smith - University of South Carolina Press - 1999 - 264 pages
[2] - La part des confiseries et boissons est inférieure en France de plus de la moitié de ce qu'elle est aux Etats-Unis.
[3] - Why Popcorn Costs So Much at the Movies: And Other Pricing Puzzles - Richard B. McKenzie - Springer - 2008 - 342 pages