Parangon du blockbuster ayant généré tout un univers fictionnel et des produits dérivés bien réels, Star wars a pourtant commencé de façon modeste cinq ans avant sa sortie et ses influences sont encore plus anciennes chez les jeunes Lucas. Quelle ironie pour un film qui aura tant influencé les générations futures et l'histoire du cinéma. |
À l’origine, George Lucas découvre la structure récurrente des mythes et du voyage initiatique du héros pendant ses études d’anthropologie (1962/64). En 1968, il est marqué par les effets spéciaux de 2001, l’Odyssée de l’espace. En 1971, alors que son 1er film est présenté à Cannes, il tente d’acheter les droits de Flash Gordon qu’il avait découvert enfant à la télévision, mais les ayant-droits veulent alors Federico Fellini à la réalisation.
Il y a juste 25 ans, le 7 janvier 1998, sortait ce qui allait devenir le plus grand succès de tous les temps : Titanic, le premier film à plus de 2 Md$ de recette dans le monde et tout en haut du box-office français à plus de 21 millions de spectateurs. Il y a juste 25 ans, le 7 janvier 1998, sortait ce qui allait devenir le plus grand succès de tous les temps : Titanic, le premier film à 2 Md€ de recette dans le monde et tout en haut du box-office français à plus de 21 millions de spectateurs.Le film fut le plus gros succès de la période 1975/85 et constitue encore le film le plus vu au cinéma de son réalisateur pourtant habitué au box-office. Il a rapporté l'équivalent de plus de 2 Md€ de revenus au box-office mondial ajusté de l'inflation (soit le 4ème meilleur score de l'histoire du cinéma).
Peut-on changer les fondamentaux d'un personnage ? Assurément non. Mais qu'est ce que les fondamentaux d'un héros de fiction ? Le cas James Bond est intéressant au regard du changement récurrent d'acteurs qui l'ont interprété en assurant à la fois la continuité et le changement. Tenant compte des évolutions sociétales, certains vont jusqu'à préconiser une femme ou un acteur noir pour jouer 007. Pourquoi pas. Le départ inevitable de Daniel Craig (en tournage néanmoins pour un cinquième film) a relancé l’idée pour le personnage de James Bond : une femme ou un acteur noir. Un nom avait même circulé pour ce dernier cas, celui d’Idris Elba, le très bon acteur britannique apparu dans la série Sur écoute, Le Grand jeu et les films autour de Thor. Voici une question légitime lorsque SOS fantômes et autres Ocean’s 11 et Docteur Who ont été féminisés par Hollywood. Tandis que Annie, celle de la comédie musicale, et James West, celui des Mystères de l’ouest, sont devenus noir de peau dans leur dernière adaptation cinématographique. Et Men in black va très prochainement passer l'un de ses deux héros (l'agent M) en femme métissée avec l'actrice d'origine mexico-afro-panaméenne Tessa Thompson dans Men in black : International à la place de Will Smith (?) tandis que vient de sortir aux Etats-Unis The Hustle, remake de Le plus escroc des deux avec Anne Hathaway et Rebel Wilson à la place de Michael Douglas et Steve Martin.
Avec le vieillissement de leurs acteurs iconiques respectifs, la question pourrait se poser aussi pour Indiana Jones et Rambo (mais n’est-ce pas déjà un peu le cas avec Lara Croft ?). Par le passé, Jack Ryan, Spock, Sarah Connor, Hannibal Lecter, Sherlock Holmes, Frankenstein, Dracula, Willy Wonka, Robin des bois, Batman, Superman et autres Spider-man ont tous changé d'acteurs. Mais ils sont tous restés dans l'épure du personnage original. "Dis-moi où tu t'assois et je te dirais qui tu es". Tel pourrait être le credo de l'observateur d'une salle de cinéma tant le comportement en arrivant devant un écran avec des étrangers en dit long sur le rapport au cinéma et aux autres que l'on entretient. Choisir un film relève d’un parcours spécifique qui allie désir pour un film, besoin sociologique d’avoir vu certains films ou d’accompagner amis pu compagnon. Mais ce parcours se poursuit pour le spectateur par le choix de la place qu’il privilégiera dans la salle pour s’asseoir. On considère que les meilleures places ne sont ni trop près (fatigue oculaire d’un espace visuel rempli obligeant à tourner la tête), ni trop loin (écran proportionnellement petit et détails non visibles). Les spécialistes recommandent de pouvoir garder un angle de vue en verticalité de 35° et en horizontalité de 36° minimum (pour les places du fond) et 90% maximum (pour les places devant), ce qui est souvent plutôt au centre (pour les salles carré) ou vers l’avant (pour les salles toute en longueur). Les places trop proches de l'écran souffrent aussi de laisser à voir les trous dans l'écran pour le passage du son avant. Le son est également étudié pour être optimisé au centre à environ un tiers de la longueur en venant du fond. Mais chaque salle a son réglage et il arrive que l'optimum de l'image ne corresponde pas à celui du son. Pour autant, la zone centrale, à 2/3 de l'écran (et jamais en lateral), serait à privilégier. On pourrait penser qu’une certaine rationalité pour celles qui offrent la meilleure image et le meilleur son, les critères s’avèrent là aussi bien plus complexes. 2019 est une année chargée historiquement pour le cinéma de science-fiction. De nombreux films fantastiques s'y réfèrent comme période de référence pour y décrire le futur. Ce n'est pas totalement un hasard car les années 80 se sont souvent projetés sur la présente décennie qui paraissent bien lointaine à l'époque. Il est désormais possible de porter un regard rétrospectif sur ce cinéma qui imaginait notre présent. En 1902, déjà Georges Méliés sortait son fameux Voyage dans la lune. Un film quelque peu prémonitoire de ce que feront les américains 67 ans plus tard, mais qui doit d'abord beaucoup à Jules Verne et son Autour de la Lune paru exactement 100 ans avant le premier pas lunaire de Neil Armstrong [1]. Et Métropolis de fritz Lang donnait en 1926 une vision socialement stratifiée des villes modernes de 2026, mais si le propos peut rencontrer quelques échos sociaux avec le monde d'aujourd'hui, force est de reconnaître qu'il a d'avantage inspiré la science-fiction future (Star wars, Blade runner, Dark city, le cinquième élément ...), que notre société malgré l'inspiration déjà d'une intelligence artificielle humanoïde. Le cinéma aime à projeter le spectateur dans un univers qui le sort de son ordinaire. Le fantastique et la science-fiction sont donc parmi les genres préférés du public. Mais comme il faut aussi qu'il puisse se projeter et s'intéresser à l'histoire pour toucher la cible la plus large, les scénaristes aiment à ne pas trop s'écarter du présent. Une durée d'une trentaine d'année est donc souvent retenue car c'est à la fois suffisamment loin pour imaginer des changements radicaux et suffisamment près pour que la grande majorité des spectateurs sachent que c'est un monde dans lequel il pourrait très bien évoluer dans le futur. C'est ainsi qu'en 1949 George Orwell choisit de retenir 1984 pour évoquer l'évolution possible vers une société totalitaire et qu'1968 Arthur C. Clack et Stanley Kubrick retinrent 2001 comme référence pour placer l'intrigue interstellaire de 2001, l'odyssée de l'espace. Notre présent est donc surtout abordé par les films des années 80 où la science-fiction s'est démocratisée pour faire la synthèse de deux films à quelques mois d'intervalle quelques années plus tôt : Star Wars (mai 1977), le space opera intemporel de George Lucas et Rencontre du troisième type (novembre 1977), le film fantastique raconté au présent de Steven Spielberg.
The Room traîne depuis plus dix ans une étonnante réputation de nanar, mais son audience restait encore confidentielle. La chronique de son tournage dans The disaster artist jette à la fois un projecteur sur cet étrange film que les spectateurs ont détourné de son discours initial et une occasion de voir en creux comment on (ne) fait (pas) un film. Une histoire double qui s'étend sur quinze ans. Le cinéma américain distribue plus de 500 films par an (le double de la France pour un pays cinq fois plus grand qui exporte aisément sa production). En fait seulement un quart d'en eux bénéficient d'une exploitation en salles significative. On connait bien la plupart des dix films mensuels provenant des majors et les quelques films indépendants parviennant jusqu'à nous grâce à leur talent ou la réputation de leurs acteurs/réalisateurs. Pourtant tout n'est pas rose et certains films finissent dans les poubelles de l'exploitation après un échec qui tue toute velléité à un distributeur de le distribuer en vidéo ou de réussir à le vendre à une chaîne du cable. Malheureusement, plus personne ne se souvient d'eux et même le statu de nanar est réservé de fait à des films qui ont pu rencontrer un public : Sans parler de Superman 4, Le fils du Mask ou Donjons et Dragons qui étaient prévus pour être des blockbusters, les nanars comme Sharknado ou Birdemics ont été conçus avec un sens aiguë du second degré. Leur (anti-)succès est certes disproportionné, mais on peut dire qu'ils ont atteint leur cible. The Room échappe totalement à ce classement. Il a été conçu avec une ambition au premier degré tandis que son échec en salles est abyssal et proportionnel à ses qualités. On voudrait comparer le film à un nouveau Plan 9 from outer Space que Tim Burton a popularisé en son temps avec son Ed Wood (1994). Edward D. Wood était un réalisateur de série Z au talent incertain, mais reconnu dans son système de production avec un certains succès à son niveau qui lui a permis de continuer à réaliser de nouveaux films de 1954 à 1971.
Il arrive parfois que le spectateur s'étonne de retrouver la même intrigue - ou presque - servir les scénarios de deux films qui sortent quasiment simultanément. C'est souvent étonnant, parfois logique ... Un phénomène qui prend de l'ampleur avec la mondialisation et l'augmentation du nombre de films produits. En 2019, il y aura deux films pour évoquer l'assassinat de Sharon Tate, l'actrice et épouse de Roman Polanski : Il était une fois Hollywood de Quentin Tarantino et The hauting of Sharon Tate de Daniel Farrands. Pas un film de cinéma sur ce drame en un demi-siècle et voici deux films la même année produits aux Etats-Unis. Les traitements seront très différents mais la coïncidence est troublante. Avec plus de 500.000 films produits depuis 120 ans, les scénaristes et réalisateurs ont montré leur capacité à créer des oeuvres originales. C'est loin d'être évident avec un object fictionnel qui doit suivre des schémas récurrents pour satisfaire les attentes des spectateurs et créer de la dramatique. Ainsi la structure en trois actes est devenue la norme entre une présentation des personnages et du nœud de l'intrigue, puis un acte 2 centré sur la déclinaison de cette intrigue pour aller vers la résolution avec habituellement au moins un coup de théâtre qui relance la dynamique et enfin une dernière partie qui se concentre sur la résolution du problème du héros autour d'un climax. Cela permet à quelques théoriciens de proposer des recettes pour écrire un "bon" scénario, de John Truby à Robert McKee. George Martin a même identifié les 20 intrigues types que l'on retrouve habituellement dans les structures narratives des films :
Le remake d'Intouchables est sorti ce week-end après 16 mois au purgatoire et beaucoup de raisons d'être septique quant à son succès au regard des critiques et polémiques dont le film était victime. Le verdict est tombé (20 M$ en trois jours) et le public est à nouveau séduit par cette histoire qui avait déjà touché le monde il y a sept ans. Intouchables avait séduit le plus grand nombre pour s'affirmer comme l'un des plus grands succès non anglophones de ces dix dernières années. Mêmes les Etats-Unis avaient été séduits par le film du tandem Eric Toldedano et Olivier Nakache : Sorti en mai 2012, The Intouchables avait été vu par plus d'un million d'américains (10 M$ de recettes). Mais surtout un box-office mondial de 426 M$ grâce à son succès en France évidemment (près de 10 millions de spectateurs pratiquement comme les recordmmen Bienvenue chez les Ch'tis et Titanic) mais aussi partout où il est sorti en Europe (Espagne, Pays-Bas, Italie, Belgique, Suède et surtout Allemagne [1]) et en Asie (Japon et Corée du Sud) A l'image de Bienvenue chez les Ch'tis qui a généré la volonté de quelques producteurs étrangers de faire leurs remakes nationaux, il était donc évident que Intouchables générerait la même envie. Les Italiens ont connu un beau succès avec leur version du film de Dany Boon. Plus de dix ans après sa sortie en France, on attend toujours la version des américains à laquelle était attachée Will Smith qui devait jouer sur le contraste entre la côté Est et le Midwest : le studio Warner a jeté l'éponge en 2015 après le rejet par Dany Boon d'une dernière version du scénario américanisé. En revanche, la mise en production du remake d'Intouchables a été bien plus rapide : Dès mars 2016, cinq après la sortie française, sortait la version indienne avec Oopiri.
La fréquentation 2018 est en baisse de 4% en sauvegardant tout juste la barre des 200 millions de spectateurs. Mais le chiffre d’affaires des exploitants reste stable grâce à l’augmentation du billet moyen (effet 3D et 4D). Un indicateur d’un cinéma qui renforce sa différenciation par le grand spectacle face à un cinéma international montrant chaque année un peu plus sa diversité.
Les années se suivent et semblent se ressembler. Le box-office est toujours dominé par des blockbusters qui se déclinent en série qui a pourtant vu disparaître leur parrain, Stan Lee : on dénombre 10 films dont 7 d’entre eux sont dans le top10 du box-office mondial et même trois aux trois premières places si on y classe Les Indestructibles 2 (du studio Pixar) qui doit tant aux 4 fantastiques de Marvel.
Pourtant à y regarder de plus près, les films de super-héros apportent aussi leur diversité : des films inaugurant de nouveaux héros (les évitables Venom et Aquaman), des films avec un casting 100% minorité (le réussi Black panther), des versions animées (les films d'animation Les indestructibles 2 donc mais aussi Spider-man : new generation et Teen Titans Go), des films interdits aux enfants (le méta Deadpool 2) et des films aux fins atypiques (l'étonnant Avengers : infinity war).
Sergio Leone et Ennio Morricone ont insufflé un second souffle au western en 1964, mais le succès du film Pour une poignée de dollars a généré plus de 400 films en 10 ans qui auront fini par décrébiliser le genre auprès du grand public. Un film qui commence par les retrouvailles involontaires de deux auteurs encore inspirés par le recyclage avant de trouver là les bases de leur art.
Quand on associe Ennio Morricone à un réalisateur italien, un nom revient logiquement : Sergio Leone. Pourtant, ils n'auront fait que six films ensemble sur des réalisations du maître du western italien [1] alors que le compositeur romain aura contribué à 12 films de Giuliano Montaldo et même 15 de Mauro Bolognini. Mais Sergio Leone aura été à l'origine de la renommée d'Ennio Morricone quand Ennio Morricone aura contribué à révéler Sergio Leone dans l'histoire du cinéma. La rencontre cinématographique a eu lieu en 1964 avec Pour une poignée de dollars, le premier film de la trilogie de l'homme sans nom avec Clint Eastwood.
Avant 1964, Ennio Morrincone n'avait que trois ans dans l'industrie cinématographique avec un dizaine de films italiens aujourd'hui oubliés, dont quatre de Luciano Salce qui fut le premier à faire appel à lui. Après, il s'imposera comme l'un des principaux compositeurs du siècle (malgré trois Razzies du pire compositeur de musique de film pour un seul Oscar). Il joue déjà avec des orchestrations travaillées et à intégrer des bruitages ou instruments originaux à ses compositions. Sergio Leone s'est lui fait une réputation dans le milieu comme assistant-réalisateur (dont la course de chars de Ben-Hur), mais il reste inconnu du public malgré le succès du Colosse de Rhodes archétype du péplum avec tous les défauts du film de genre de l'époque. Les deux auteurs sont tellement peu connus qu'ils vont signer leur première rencontre sur l'écran sous pseudonyme. Au générique, Sergio Leone devient Bob Robertson et Ennio Morricone se nomme Dan Savio [2]. Une pratique habituelle des producteurs italiens pour cacher l'origine transalpine du film.
Il n'existe pas qu'une histoire du cinéma, mais bien plusieurs. La mondialisation entraîne non pas une globalisation mais une sélection d'une sorte de chaîne qui lierait des films entre eux. Une lecture historique qui privilégie une certaine vision du 7ème art, loin des "blockbusters sans âme" mais aussi des films "expérimentaux sans lendemain". Avec sa formule tirée des Frères ennemis, le sinistre Brasillach relevait que la mémoire collective se fonde sur le récit proposé par ceux qui sont au pouvoir : "l'histoire est écrite par les vainqueurs". L'histoire du cinéma ne semble pas échapper à cet aphorisme : elle est trop riche pour se résumer à ce qu'on trouve dans les encyclopédies du cinéma et autres ouvrages du type les "1001 films à voir avant de mourir". C'est une certaine idée du cinéma qui est extraite des 500.000 films produits dans le monde [1]. Et ça commence dès ses origines. Dire que les Frères Lumières ont créé le cinéma, c'est renvoyer à l'oubli les inventions des frères Skadanowsky et d'Emile Reynaud. Aux Etats-Unis, on cite même plus volontairement Thomas Edison et William Dickson pour leur Kinétographe datant de 1893. Mais comme la victoire vient avec la diffusion de masse, les frères Lumière ont un avantage pour marquer de leur nom le divertissement que nous connaissons car leur invention intégrait une projection collective. Les vainqueurs sont d'abord définis sociologiquement. L'histoire officielle du cinéma est d'abord écrite par ceux qui sont en âge de l'écrire. Il y a donc souvent un écart entre ce qui sort sur les écrans et ce qui devient un classique.
Le Voyeur a dû attendre le passage d'une génération pour que celle-ci puisse prendre la parole et reconnaître l'avant-gardisme du film de Michael Powell. Souvent d'ailleurs par opposition avec un cinéma de genre qui commençait à émerger à la fin des les années 70 et pour mieux montrer ce que devaient ces "nouveaux" films à son précurseur. Il a fallu donc attendre réellement que certains de ces adolescents soient des adultes écoutés pour que leur avis compte : parmi eux, Martin Scorsese et Brian De Palma en furent d'ardents défenseurs. Un cinéaste comme De palma bénéficia également de l'effet du temps, puisqu'on l'assimila à un copieur talentueux hitchcockien à ses débuts avant que les critiques de cinéma ne furent composés de son premier public et qu'il devienne à son tour une icone (le Centre Pompidou lui a consacré un hommage en 2002). Il en est de même de la plupart des faiseurs et cinéastes de genre des années 80 comme Joe Dante, Robert Zemeckis, David Cronenberg ou James Cameron. Ils furent tous considérés comme des réalisateurs de série B avant qu'avec le temps, ils soient largement réévalués, y compris pour leurs premiers films. Bien peu de films vus majoritairement par un public adolescent n'ont le droit à la reconnaissance des institutions. Du moins à leur sortie. A l'heure où sort un onzième Halloween, il est temps de faire le bilan d'une franchise qui se répète inlassablement depuis 40 ans. Un zoom sur le choix des producteurs / distributeurs de présenter chaque film sous un titre qui est devenu quasiment une marque autour d'un personnage surnaturel et monomaniaque. Lorsque John Carpenter se lance dans la création d’un thriller sur un tueur de baby-sitter, il n’y a pas vraiment encore de titre. Son producteur Irwin Yablans, qui lui a proposé le concept, pense bien à The babysitter murders, mais c’est surtout un titre de travail qui sera rapidement remplacé : le producteur a l’idée de fixer l’intrigue la nuit du 31 octobre, fête des morts particulièrement populaire chez les étudiants qui en seront la cible privilégiée. Le titre Halloween s’impose donc naturellement et oriente l’écriture du scénario sur une quasi-unité de temps et de lieu après un court et sanglant prologue. C’est ainsi que la saga lancée en 1978 va populariser le slasher. Un genre apparu quatre ans plus tôt avec Black christmas [1]. Déjà un titre qui met en avant un jour de fête. Un genre qui pullulera par la suite avec un grand nombre de copies, dont le plus gros succès proposera lui-aussi un tueur ayant quelques problèmes de famille et qui se manifeste un jour particulier : en 1980, Vendredi 13 imposera Jason et son masque de Hockey. Le film Halloween rendra célèbre, lui, le personnage fantasmagorique de Michael Myers et son masque blanc inexpressif [2]. Une suite sort en 1982 sous le titre Halloween II. C’est une suite directe du premier qui reprend l’intrigue là où le premier film avait laissé son tueur iconique. Mais lorsque le succès appelle un troisième film, John Carpenter qui est toujours au commande du scénario - mais plus de la réalisation - décide d’éviter la redite et d’orienter le film vers une autre intrigue autour d’halloween. Exit donc Michael Myers et sa victime préférée Laurie Strode (jouée par la fille de la Janet Leight de la scène de la douche de Psychose, Jamie Lee Curtis). Le film ne marche pas, reproduisant le type d'erreur qui avait failli enterrer la série La panthère rose : en négligeant l’animal dans son générique et son titre, les producteurs avaient perturbé la promotion de leur suite Quand l’inspecteur s’emmêle (a shot in the dark en vo) avant de revenir après systématiquement à un titre reprenant la fameuse Panthère rose. Halloween III, le sang du sorcier fait l’inverse en promettant la continuité des deux premiers films alors qu’il raconte une histoire sans rapport ... sauf que de parler d’halloween.
Steven Soderbergh a proposé avec son apps interactive une nouvelle expérience de fiction en jouant sur les points de vue. Mais la plupart des spectateur n'auront droit qu'à un remontage sous forme d'une série qui cache son héritage interactif et trahit son ambition initiale. A consommer de préférence en connaissant l'origine du projet et en s'accrochant un peu au début. Steven Soderbergh est revenu au cinéma après quatre ans d'absence sur le grand écran. Une absence qui n'a rien à voir avec un congé sabbatique. Le plus jeune réalisateur palmé à Cannes est au contraire connu pour sa suractivité : pendant cette période, il a tourné entre autre un téléfilm (Ma vie avec Liberace), réalisé deux saisons complètes du superbe The Knick et préparé un ovni audio-visuel : Mosaïc [1]. Même si le budget de 20 M$ de cet ovni relève de la grosse production télévisée, on est formellement plus proche de l'esprit frondeur et expérimental de Schizopolis, Bubble et Girlfriend experience. Mosaïc n'est pas un film, ni une série, mais une offre expérientielle fondée sur l'interaction avec le spectateur pour choisir son angle narratif. Ce n'est pas non plus le spectateur qui choisit l'histoire : elle reste toujours la même, mais il peut choisir le personnage qu'il souhaite suivre. Dans cette enquête policière, tout est fait pour créer de fausses pistes à la façon d'un bon thriller. Steven Soderbergh reste un conteur et ne délègue à son spectateur qu'une fonction de son rôle de réalisateur : le choix de l'axe narratif.
Première année est un film sur deux parcours étudiants au sein d'une université de médecine, réalisé par un ancien médecin devenu réalisateur. Entre docu-fiction et fiction documenté, Thomas Lilti a choisi principalement le camp du cinéma. Un choix qui l'amène à choisir entre décrire la réalité ou raconter une histoire. Un choix qui a divisé quelques spectateurs. Le cinéma est là pour raconter des histoire. mais pour toucher au coeur son public, certains chemins sont plus efficaces. Il faut d'abord parler du spectateur pour l'impliquer et lui permettre de ressentir ce qu'il voit à l'écran dans un mouvement sympathique ("ressentir avec"). Mais il faut aussi l'amener à découvrir des choses différentes de son quotidien pour remplir son objectif de divertissement. Si le cinéma est un moyen d'évasion, il faut bien que le cinéma projette au spectateur un lieu ou des faits qui l'amènent autre part que son traditionnel "métro, boulot, dodo". Entre parler de son soi et surtout ne pas parler de chez soi, le réalisateur doit construire une fiction intime. Lorsque James Cameron évoque le naufrage du Titanic, il raconte une histoire universelle où le riche et le pauvre, homme et femme, peuvent s'identifier. Lorsque Marvel conte une aventure de super-héros, le studio prend bien soin d'attacher des faiblesses psychologiques à son héros que chacun a pu déjà expérimenter. En tournant Première année, son troisième film sur le milieu des médecins, le réalisateur Thomas Lilti a été confronté à cette opposition de raconter une histoire originale et de faire passer des émotions connues du plus grand nombre. Et comme au cinéma, on privilégie toujours l'image aux mots, il a fait des choix dans ce sens. Parfois en ajustant la réalité quand cela pouvait conforter son propos.
Quand les exploitants regrettent que certains films ne sortent plus en salles, ils en appellent à l'essence même du cinéma. Le cinéma est né avec un public devant des images, mais entre le contenu (le film) et le contenant (la salle), il y a deux définitions du cinéma qui s'affrontent ... de façon intéressée. L'histoire du cinéma se répète une fois de plus. Les festivals de cinéma sont l'un des plus bels écrins pour le cinéma. Ils permettent de transformer en événement la sortie d'un film lors d'avant-premières médiatisés avec des stars qui se prêtent volontiers tant à la promotion du film en question (surtout si elles jouent dedans) qu'à la leur. Même si l'art est désintéressé, il s'agit d'un "désintérêt intéressé" où tout est produit [1]. Et tout le monde se tient pour maintenir un équilibre financier où chacun a l'habitude de prendre une part des flux financiers qui transitent, tant pour faire le film (les artistes et techniciens) que pour recevoir une part des recettes (exploitants, distributeurs, producteurs et ... artistes). Il n'en est pas vraiment autrement dans les autres secteurs. Mais ce secteur revendique sa spécificité culturelle ; il relève essentiellement de puissants oligopoles (quelques grands diffuseurs, têtes d'affiche et festivals en particulier) et d'une faible concentration (des milliers de producteurs et des milliards de spectateurs). C'est à la fois une industrie et un artisanat. Le choc est donc violent lorsqu'un nouvel acteur, comme Netflix, vient troubler des équilibres construits depuis longtemps et qui avaient su satisfaire tout le monde après l'avènement de la télévision payante et de la vidéo dans les années 80. Plus de trente ans déjà.
Le Studio Pixar est parvenu à prendre la place laissée vacante par Disney Animation autrefois indétrônable. Derrière cette ascension, il y a une histoire de la technologie et celle d'hommes et de femmes qui voulaient tous simplement raconter de bonnes histoires.
L'histoire de Pixar se joue en 1983. Une visite est organisée d'employés de Disney dans les locaux d'une division de Lucasfilm, la société de production du père de Star Wars. Ils sont accueillis par Ed Catmull qui dirige cette division, Graphics Group de la Direction des Ordinateurs. Disney a travaillé deux ans plus tôt sur le film Tron de Steven Lisberger et certains pensent que les ordinateurs peuvent aider le studio. Parmi les visiteurs de Disney chez Lucasfilm : John Lasseter qui se montre le plus intéressé par ce qu'il découvre. Il n'a pas participé à la création de Tron, mais il a observé de loin sa production alors qu'il n'est qu'un jeune animateur qui travaillait sur Rox et Rouky. Il sort de chez Ed Catmull convaincu du potentiel de l'image créée par ordinateur d'autant qu'il a quelques projets avec des objets animés qui pourraient bien s'y prêter : une adaptation du conte pour enfant The Brave little toaster pour lequel il imagine combiner une animation traditionnelle pour les personnages et un décor tridimensionnel créé avec les ordinateurs alors que jusqu'à maintenant l'animation se bornait à un dessin d'arrière-plan même dans les productions coûteuses de Disney. Dans la foulée, avec Glen Keane, il fait un test en créant un extrait de When the wild things pour tester l'impact des changements de perspective et interaction entre animation et infographie. Lorsqu'il propose à sa hiérarchie |1] de passer à un long métrage sur le même principe, il reçoit un accueil tellement glacial qu'il sera même remercié.
Le cinéma d'horreur a tendance à revenir sans cesse sur les mêmes recettes. Les films The Purge s'inscrivaient initialement dans le sous-genre des home invasions pour finalement s'étendre avec le succès et décrire un univers dystopique qui en dit beaucoup sur une certaine vision de l'âme humaine. Un succès commercial qui ne se dément pas.
A Hollywood, on observe une dichotomie de plus en plus forte entre le cinéma de marque qui déploie ses franchises et un cinéma de prototypes. Le cinéma du milieu semble avoir du mal à s’imposer faute de spectateurs fidèles à ce cinéma.
Il est vrai que le public semble se répartir entre les cinéphiles toujours attachés à voir les films au cinéma et un grand public prêt se déplacer pour regarder sur grand écran des films à grand spectacle. Un peu à l’image de la fameuse « disparition des films du milieu » annoncée par Pascal Ferran en 2007.
Pourtant, loin du cinéma d'auteur, une série de films s’est imposée dans cet univers concurrentiel : allier petit budget, franchise et succès récurrent. Il s’agit de The Purge, habilement renommé American nightmare en France.
La franchise raconte une Amérique dystopique (le premier film se déroule en 2022) où le gouvernement a rendu légal tout crime, y compris le meurtre, perpétué pendant une nuit de 12 heures définie légalement. Chaque film raconte une de ces journées où « la suspension du contrat social renvoie l'humanité à un temps de lutte à mort pour sa survie » (Le Monde)
John Williams a prévu d'accompagner la saga Star Wars jusqu'à l'épisode 9 avant de prendre sa retraite. Presque un devoir pour lui, à 86 ans, que de chercher à accompagner l'aventure initiée par George Lucas il y a 40 ans et pour laquelle il reste si attaché dans la mémoire collective. Pourtant, cette musique a elle aussi sa petite histoire.
Quand George Lucas se lance dans La Guerre des Etoiles, l'aventure a tout du pari risqué : la science-fiction reste attachée à un genre mineur et George Lucas n'est que l'homme d'American Graffiti, triomphe de 1973 qui s'appuyait sur sa bande-son rock du début des années 60. Certes, la Fox a connu un joli succès avec La planète des Singes en 1968. Oui, 2001, l'odyssée de l'espace a montré la même année ce qu'on peut faire avec un film se déroulant dans l'espace. Mais tout ça n'a pas vraiment lancé le genre (même si le film tiré du roman de Pierre Boule a généré ses quatre suites entre 1970 et 1973). George Lucas se trouve donc en terrain presque vierge lorsqu'il s'interroge sur la musique de son space opera.
La musique des films de Science-fiction n'avait pas vraiment trouvé son propre univers. On suivait les tendances des soundtracks de film en général. La musique était donc encore largement symphonique dans les années 60, pour devenir parfois plus atonale à la fin des années 60 et au début des années 70 dans la mouvance psychédélique post-68 comme pour Barbarella. De nouveaux instruments commencent à être utilisés pour créer des ambiances particulières comme dans L'âge de Cristal, mais les cuivres sont encore largement répandus pour créer de la tension dans les scènes d'action alors que les violons reviennent volontiers dans les scènes sentimentales. La musique électronique commence à être aussi de plus en plus utilisée dans ce type de film, mais le thérémine, premier instrument électronique, avait déjà trouvé sa place à Hollywood dans les années 50, notamment pour relever l'étrangeté des séquences de rêve. Le thérémine avait d'ailleurs été sollicité par Bernard Hermann dans la scifi pour Le jour où la terre s'arrêta. Le succès de La planète des singes est parvenu néanmoins à imposer, via le score de Jerry Goldsmith, une musique atonale qui sera reprise avec plus ou moins de succès dans les films fantastiques de la première partie des années 70.
On aimerait bien parfois que la réalité soit plus belle que la fiction ou se battre pour gagner contre les moulins à vent. Terry Gilliam reste un rêveur qui maintient ce fantasme depuis quarante ans dans ses films. Il aura passer la moitié de cette période à nous proposer sa version de Don Quichotte. L'histoire est belle. Presque trop belle.
Qu'on aurait voulu que l'histoire se termine avec une happy end de cinéma ! On en venait à rêver qu'on en ferait un jour un film à Hollywood. Il y a bien un film sur le tournage de Citizen Kane (RKO 281) et sur celui de Psychose (Hitchcock). Même les nanars Plan 9 form Outer Space et The Room ont eu le droit à un hommage distancé dans de jolies films avec respectivement Ed Wood de Tim Burton et The disaster Artist de James Franco.
Alors quand on revient sur la tumultueuse histoire de L'homme qui tua Don Quichotte, on se dit que la persévérance de Terry Gilliam à tourner son film et à le montrer à Cannes suffit à finir le film de son film. Il faudra alors cacher l'essentiel : l'avis du public et le dernier rebondissement judiciaire.
Rappelons que Don Quichotte de Cervantes prête à des interprétations diverses. Le roman décrit un personnage avec une vision du monde singulière qui part en croisade dans l'Espagne du 16ème siècle : on peut y voir la fatalité des désirs inassouvis ou la volonté de voir le monde tel qu'on le rêve plutôt que comme il est (ou l'inverse ?). En tout cas, ses thèmes se prêtent particulièrement à un artiste comme Terry Gilliam qui a toujours transformer la réalité tel qu'il voulait la fantasmer. C'est au centre de son prologue du Sens de La Vie (The Crimson permanent Assurance), de Brazil ou encore des Aventures du Baron de Munchausen. On ne s'étonne donc pas que le réalisateur américain (le "Yankee" des Monty Python) ait eu le coup de foudre pour adapter librement cette histoire de ce "généreux et idéaliste redresseur de torts".
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Docteur en Sciences de l'information et de la communication, Laurent Darmon est devenu par cinéphilie un spécialiste de la réception cinématographique et de la sociologie du cinéma.
Il est l'auteur d'une thèse sur "l'itinéraire de l'évaluation d'un film par le spectateur au cinéma", anime des conférences et a été le Président de la Commission Cinécole 2016. Parallèlement, il est en charge du digital dans une grande banque française.
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